De l'impromptitude raccourcie de la douleur des écorchures
Il lui avait promis les monts et les merveilles, il lui avait juré à la vie à la mort, avait fait miroiter les lendemains qui chantent, puis lui a signifié, leur union consommée, qu’elle pouvait l’oublier, histoire sans débouché, pas de temps à y perdre, trois lignes sur un texto.
Elle a pris la nouvelle dans un calme olympien, les sentiments éteints et le cœur en veilleuse.
Elle a pris la nouvelle comme on vit une blague dont on sait la teneur, en attendant la chute.
Elle a pris la nouvelle songeant à une erreur, il parlait à une autre, il l’aime bien trop pour ça.
C’est lorsque la journée a touché à sa fin, lorsque l’obscurité a étendu son voile, que son âme a compris ce qu’elle lisait en boucle, et son corps tout entier s’est pris de tremblements, ses tripes se sont nouées, ses tempes ont résonné, et de son cœur glacé, de sa gorge contractée, un long cri est sorti, de douleur et fureur.
Elle a pris la nouvelle comme une gifle au visage, cuisante et outrageante, la rougeur de la honte.
Elle a pris la nouvelle comme un poing dans le ventre, le souffle interrompu, à se plier en deux.
Elle a pris la nouvelle comme un coup dans le cœur, une lame acérée venue coupée ses ailes.
Son bras a balayé le bureau encombré, envoyant balader papiers, crayons, objets, et des poings contractés, elle a frappé le bois, y voyant son visage, s’y est frappé le front, y voyant une pierre, et à travers ses larmes, a hurlé sa colère, hurlé sa déception, hurlé sa trahison, une rage impuissante, une fureur animale, une femme blessée.
Elle a pris la nouvelle pour un bout de sa vie envoyée aux ordures d’un salaud insensible.
Elle a pris la nouvelle pour un bout de son cœur amputé sans sommeil par un chirurgien fou.
Elle a pris la nouvelle pour un bout de son âme brûlée sur le bûcher d’une illusion perdue.
Et ses larmes ont coulé, pendant de longues heures, tantôt prostrée au coin, bras autour des genoux, tantôt arrachant tout, déchirant et brisant, et ses larmes ont coulé sans épaule, solitaire, avec le sentiment de s’être un peu perdue.
Puis le jour est monté par derrière les futaies, ses rayons incendiaires sont tombés sur sa peau, et brisée de fatigue de s’être ainsi vidée, elle s’est recroquevillée, en position fœtale, à même le plancher, tremblante encore un peu, gémissements plaintifs s’échappant de sa gorge, sanglots résiduels remontant par frissons, jusqu’à qu’un noir sommeil vienne la prendre dans ses bras.
Dernier texte d'une série de quatre courts impromptu demandés pour une improvisation par thèmes. Pour celui-ci, le sujet était Souffrance --> Ame écorchée.
Illustration : I Will, par =Aegis-Strife, sur DeviantArt.
20080606