De la magie de Noël
Noël 1997.
Ca a été très émouvant parce que mon frère avait passé trois ans aux Etats-Unis et qu'il allait venir passer ce Noël à la maison.
Il nous a dit qu'il avait son billet d'avion pour le 20.
Il nous appelle le 19 pour nous dire que le vol est reporté au 22 dans la nuit.
Alors l'ambiance s'est tendue à la maison : on ne savait pas s'il allait arriver ou non.
J'étais à Santander et je devais aller le chercher à Madrid.
En plus il y avait de la neige sur la route. Mon père disait : "N'allez pas le chercher, c'est dangereux."
Finalement, je vais le chercher à Madrid, sous la neige.
Je le récupère et voilà que sur le chemin du retour, les cols sont fermés et on ne peut pas rentrer.
Mon père dit : "Restez à Burgos et passez Noël là-bas."
Finalement on a fait tout un détour et on est arrivés à Santander sur les rotules, épuisés. On n'avait même pas la joie de l'arrivée.
Un Noël ... rien.
Noël 1998.
C'était un Noël très émouvant parce qu'il y a avait un bébé à la maison. la fille de ma soeur, qui était née en juin.
Arrive le 20 et comme d'habitude : Où est-ce qu'on va passer Noël ?
Alors ma soeur dit : "Venez chez moi, parce que si on sort la petite risque de s'enrhumer."
Finalement on arrive chez ma soeur.
J'ai mis la musique, des airs de circonstance, des chants de Noël, pour égayer la soirée.
Et ma soeur qui dit : "Baisse le son, tu vas réveiller la petite."
Un peu plus tard, on était en train de fumer, et ma soeur qui dit : "Arrêtez de fumer, la fumée dérange la petite."
L'ambiance a fini par devenir tendue ...
Un Noël triste.
Il aurait presque mieux valu que la petite ne soit pas née.
Noël 1999.
Ce fut un Noël amer car mon père était mort en mars.
Et pour couronner le tout, la radio t'annonce qu'à Noël il faut se souvenir des êtres chers.
On passait Noël à se raconter des blagues qui n'étaient pas drôles.
Ma mère s'est mise à avoir de la peine.
Mon père avait demandé, pour le premier Noël après sa mort, qu'on laisse sa chaise libre à table, vide.
On dînait en regardant la chaise de mon père ...
Il était présent ... Il était absent ...
Et ma mère qui pleurait ...
Noël 2000.
Ce Noël est celui de la "tension alimentaire".
A la maison, on sert du coq au dîner. A tous les Noëls.
Mais des cousins catalans, qui venaient dîner à la maison nous disent : "Ne vous occupez pas du repas, on apporte la dinde."
Nous, on leur dit : "Non, ici on mange du coq au dîner."
Et eux : "C'est qu'en Catalogne on mange de la dinde."
Finalement, ma mère a préparé le coq ... Ma tante, la dinde ...
Et une fois à table, chacun a mangé son repas ...
Une sale ambiance à n'y rien comprendre ...
Noël 2001.
Ca c'est le Noël de mon putain d'enfoiré d'oncle.
Quand j'avais neuf ans, j'étais au village avec mes amis, et mon oncle me disait : à six heures à la maison.
Il m'obligeait à jouer aux cartes avec lui ...
Et bien quoi ? Tu n'as pas d'amis, bordel ?
Ce mec est un sale enfoiré ...
Plus tard il est parti au Brésil et il est devenu millionnaire.
Et il me disait : je vais te laisser mon héritage.
Et en moi-même je pensais : t'es qu'un sale enfoiré qui m'a gâché mon enfance...
De Rodrigo Garcia, in J'ai acheté une pelle chez Ikéa pour creuser ma tombe.
C'est espagnol, c'est noir, ça frise parfois la révolte haineuse, et surtout c'est loin, très loin, de l'esprit de Noël, mais l'occasion fait le larron, faut pas me prêter ce genre de littérature ...
Noël vous soit moins tendue, tous.